The making of a photo: à l'embouchure du Borgne

Le borgne.5h30 du matin.je suis au bord de la mer au bas de la ville, à l’embouchure… le soleil sort paresseusement de son lit et détire ses mille bras à travers les petits nuages blancs qui lui font la révérence… Arrivé la veille, tard dans l’après-midi , à peine le temps d’engager un guide de fortune “un certain de Ti Louis” et de faire à pieds, le tour de la ville afin de détecter les possibilités pour des photos… Par expérience j avais appris qu’il ne fallait jamais pénétrer dans une ville inconnue en maitre et seigneur…en conquérant…

Ti Louis avait la part belle. Populaire au sein de la ville , on l’appelait de tous les cotés..

hey..ti louis ! bagay yo bon lan menw papa…
hey..ti louis..ou fè djapòt wi la a…
hey…ti louis..pa bliye ou dwem youn ti kòb…

ça n en finissait pas pendant que moi je profitais pour saluer les gens des deux cotes de la rue étroite…

koman nou ye mesieu?.. medam..m di bonsoi wi..

Bref… ce matin, ti louis le guide etait passe me prendre de tres tot a l hotel… il semblait encore plus joyeux que la veille… sans doute regaillardi par les 500 gdes que je lui avais filés en rentrant hier soir.

j avais comme d habitude place ma camera ds un sachet et lui, le ti louis, portait fièrement mon trépied sur son épaule droite comme un trophée de chasse… Le problème c’est qu’il n’arrêtait pas de parler, en 20 minutes de marche il m avait raconté tous les tripotages de la ville et tenta même de faire de la politique…

oh oh.. li pote m plainte pou senateu a…li potem plainte pou depute a.. li potem plainte pou magistra a.. li pa vle wè kazèk la ki se you vacabon…

oh oh..

pour mettre fin a ses blablablas entravants, j’ai du lui donner 50 gdes pour aller s’ acheter des patés plus loin et me laisser seul..

Installé devant un merveilleux paysage, j’etais déja à ma dixième prises de vue sous tous les angles tout en me disant que seuls manquaient a la scène un ou 2 petits voiliers blancs dans ce décor de rêve…

je commençais a plier bagages pr me rendre autre part quand je vis surgir sur la riviere venant de je ne sais où, une longue embarcation blanche qui glissait doucement vers la mer… j’ai vite fait de réinstaller la camera et je recommençai à shooter…c’était un cadeau du ciel… le plus surprenant, arrive à ma hauteur exactement la ou il le fallait, quelqu’un apparut sur le pont, jeta l’ancre et disparut…

Cinq…dix minutes passèrent. mon cœur battait la chamade …mon souffle était devenu court..je transpirais à grosses gouttes tout en faisant le maximum de photos dans tous les sens… puis le même inconnu réapparut sur le pont et leva l ancre.

le mystérieux bateau s’enfonça dans la mer, bifurqua gauche derrière la montagne en pointe et disparut.

Je restai planté la un bon moment, toujours sous le choc… je tournai la tète derrière moi..puis à droite…puis à gauche..puis vers le ciel..cherchant quoi…cherchant qui surtout…? je ne sais.. Tout le reste de la journée, je vérifiai de temps en temps dans la camera, que le bateau était toujours dans l image…

eh oui.. bien en place… je venais pour la première de ma carrière de photographier un mirage…

voila.

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